lundi 24 août 2020

Lire un homme politique sur les affaires publiques……



En France, les hommes politiques et de médias font partie de ceux qui donnent le ton dans le monde de l’édition, à chaque rentrée littéraire. Ces deux groupes de personnes vivent de l’intérieur des évènements qui à un moment ont marqué les esprits. Il est donc normal et naturel que leurs versions et positions à l’époque soient connues et contées. Quoi de  mieux que des écrits pour mettre dans l’espace public ces affaires publiques, (qui nous concernent tous). Ne dit-on pas que les paroles s’envolent  et que les écris restent…

Ce weekend end m’a permis de replonger dans une des passions, la lecture. « Le Protocole de l’Elysée, Confidences d’un ancien ministre sénégalais du pétrole » de Thierno Alassane SALL  a été au  menu  de ma  lecture qui est une nourriture de l’esprit. Son auteur est un acteur politique connu et reconnu. Sa réputation d’intégrité, qu’on soit d’accord ou pas avec lui, n’est pas remise en cause. Son courage aussi. Nous Thiessois, nous sommes présentés comme des hommes courageux hein. Lol …..

Comme son nom ne l’indique pas, ce livre n’est pas seulement un gisement de nouvelles révélations sur la gestion de nos ressources pétrolières et gazières, dont la fumée de présumées scandales  se s’est pas dissipée sur l’espace médiatique, depuis quelques années. 

Comme les ouvrages des hommes politiques sénégalais de ces dernières parutions, « Le Protocole de l’Elysée », est aussi le condensé des points de vue d’un citoyen sur la marche en général de son continent et particulier de son pays. Les défis auxquels l’Afrique est confrontée ces dernières années, se résume en un seul mot, la gouvernance.

Il est donc souhaitable qu’il ait des confrontations d’idées, de postures, de positions sur l’évolution de certaines questions liées à la gouvernance. Donc que le fait que des acteurs politiques ou même des citoyens, via des livres, qui traversent le temps, donnent leurs positions et postures sur la marche de notre continent, devrait être encouragé…. 

Au passage, je suis agréablement séduit par la qualité d’écriture de l’auteur qui m’a replongé dans le plaisir de la lecture….

A Jarama Thierno…. 

#Bon_début_de_semaine

#Afrique_mon_continent

mardi 23 juin 2020

Mon voisin anonyme, ce héros du 23 juin



C’est la spécificité des grandes batailles ou des révolutions. Il y a ceux qui les font et ceux qui en profitent. Un an après cette grande révolution citoyenne du 23 juin 2011, j’estime que les héros ou même le héros de cette journée mémorable ne sont pas ceux qui occupent à tour de rôle les médias pour réclamer une paternité. A juste raison peut être…. Mais les héros du 23 juin ou le héros sont chez eux après que 365 jours se sont écoulés. En ce jour anniversaire, ils sont quitte avec leur conscience et sont heureux de cette matinée estivale pour avoir participé à cette  seule bataille qui valait d’être vécue de l’année 2011 au Sénégal. Ce héros ou ces héros du 23 juin sont anonymes comme l’est le soldat inconnu qui dort sous l’Arc de Triomphe de Paris où une flamme qui ne s’éteint jamais rappelle aux touristes et visiteurs du soir que si ce n’était pas des gens comme lui on ne serait pas là à parader ou à prendre des photos. Le héros de ce 23 juin est à l’image de ce soldat inconnu dont le nom est jusqu’à présent invisible sous la plaque de sa tombe. Le 23 juin 2011 dans un élan populaire, des Sénégalais se sont levés sans qu’ils ne soient appelés, et ont investi le centre ville de Dakar avec comme point de ralliement la place Soweto, siège de l’Assemblée nationale. Certains ont laissé boulot, cours, occupation, famille inquiète, en se disant, que s’ils laissent faire, ils auront des comptes à rendre à l’histoire, à leurs enfants et petits enfants. Notre pays était à un tournant décisif où il fallait choisir entre la royauté ou continuer de vivre dans une république. Une république que nos pères, grands pères, oncles et aînés nous ont léguée intacte. Il nous incombait donc d’en faire de même à nos enfants et petits enfants. Si nous avions accepté cela, demain nous ne nous indignerons pas si nos enfants acceptent de vivre dans une monarchie. Frantz Fanon avait raison de dire que «chaque génération a une mission. A elle de la remplir ou de la trahir ». Ceux de ma génération ont, modestie à part, rempli leur mission à refusant de retourner à la royauté plus de 100 ans après son abolition. De tous les gens avec qui j’étais devant l’Assemblée nationale, ce 23 juin 2011, j’en ai distingué deux personnes à qui j’attribue la paternité de cette victoire. L’élève inspecteur avec qui j’étais assis sur les trottoirs discutant de l’avenir de notre pays. Il m’avait dit qu’il a séché ses cours à l’Ecole Normale Supérieure pour venir « défendre sa patrie » comme il l’a toujours fait quand celle-ci l’a appelé. Une riche carrière l’attend dans l’administration s’il finit ses études, mais cela n’avait aucune importance  quand la nation était en danger et il revenait à ses dignes fils qui doivent  prendre ses destinées d’ici quelques années de la défendre. Peut être qu’on se verra pas plus jamais mais je garde de lui une phrase qu’il aimait prononcer cette matinée-là. « Seuls les gens libres sont là. Ceux qui ne sont pas venus et qui n’ont pas de raison, sont ceux qui ont toujours accepté la soumission ».

L’autre personne qui m’a marqué ce jour et que je considère comme le héros du 23 juin, c’est mon voisin dont je ne connais pas le nom jusqu’à présent. Cette matinée -là on s’est croisé dans la boutique du coin quand j’achetais du pain. Il m’a dit « qu’il faut aller à l’Assemblée défendre notre patrie ». J’étais surpris par sa réaction moi qui le voyais toujours avec son allure correcte et nonchalante dans les ruelles de mon quartier, comme un gosse de banlieue aisée. Avec ses lunettes  fines comme celles des curés d’église et son visage marqué par ce que les Chinois « les feux sacrés de l’intelligence », il était selon ce que j’ai appris plus tard, un jeune fonctionnaire qui a fait de bonnes études. Quand  je l’ai vu arriver au petit matin, après moi à la Place Soweto, j’ai compris que cette journée allait entrer dans l’histoire, parce que des hommes et femmes, anonymes, sans aucune coloration militante ou partisane, constituaient le gros de la troupe de soldats engagés à défendre leur patrie. L’histoire leur a donné raison et ils continuent leur bonhomme de chemin dans leurs vies respectives sans attendre une quelconque récompense à leur participation à cette journée mémorable. Bon anniversaire à tous ces soldats inconnus qui ont allumé une flamme citoyenne qui ne s’éteindra jamais.



samedi 28 mars 2020

URGENCES SANITAIRES ET DÉMARCHES SÉCURITAIRES


Par Oumar NDIAYE*

Les crises sont des moments de déficit de sérénité. Mais elles doivent aussi avoir des heures de lucidité afin de pouvoir comprendre ce qui nous arrive, nous organiser dans l’urgence et les conséquences,  et y faire face demain.
En un laps de temps, une crise sanitaire locale est devenue planétaire. Les systèmes de santé des pays ont été obligés de s’adapter jusqu’à être dépassés. Il est rare de voir une menace sanitaire se globaliser en si peu de temps. C’est une première. Mais ne nous s’y trompons pas. Les menaces à venir seront toutes planétaires. Globalisation oblige. Leurs propagations se feront à grande vitesse… Le cycle des incertitudes gouvernera désormais l’humanité. C’est fini, les certitudes dans plusieurs domaines de la vie active.
Gardons donc à l’esprit que dans l’époque où nous vivons, les crises ne seront pas exceptionnelles. Elles se propageront de manière exponentielle et relèveront d’un caractère multidimensionnel. Déjà éducation, sport, tourisme, tous sont à l’arrêt. Nous vivons donc une ère « crisogène », avec des phénomènes de crise qui s’accélèrent et s’amplifient à un rythme soutenu. Ces crises sont aujourd’hui des menaces sécuritaires et sanitaires et sont des marqueurs et curseurs de notre monde….

DU LOCAL AU GLOBAL. C’est vers la fin des années 60 que le canadien   Marshall Macluhan nous parlait déjà d’un monde devenu village planétaire en référence aux moyens de communications. Sa théorie très célèbre du « Global Village » a pendant longtemps rythmée la vie des sciences de l’information et de la communication. Macluhan n’avait pas tort de nous dire que nous sommes dans un monde « où l'on vivrait dans un même temps, au même rythme et donc dans un même espace ». Une théorie confirmée aujourd’hui par la mondialisation du « tout et de tout ». Des finances au football en passant par Facebook et nous le souhaitons pas des funestes décomptes avec l’urgence sanitaire qui secoue le monde entier.
Parti du local, le coronavirus avec sa trajectoire virale, a atteint un niveau global qui fait peur et inquiète.  L’interdépendance du monde a fait que les séquences sont aujourd’hui les mêmes dans presque toutes les télévisions du monde avec les mêmes conséquences sur nos vies et nos peurs. Partie de Wuhan en Chine continentale, cette pandémie a gagné peu à peu, toutes les autres parties du monde. A ce jour 163 pays sont directement touchés sur un total de 198 pays que compte la planète. C’est dire que ¾ du monde est sujet à cette crise sanitaire. Dans notre époque contemporaine, rare événement n’a eu autant d’attention et donné tant de convulsions que cette urgence sanitaire qui a eu même le don de reléguer sur la touche les problématiques sécuritaires au premier desquelles la question terroriste. Son déclenchement a été local et ses répercussions globales. La connexion entre le local et le global n’a jamais été aussi fatale.
CONTINUUM DEFENSE-SECURITE-SANTE. Depuis le début des années 2000, les bouleversements dans le monde ont été toujours portés par les menaces asymétriques de type sécuritaires qui ont fini de se mondialiser sous diverses formes (terrorisme, trafics de tout genre). Mais aujourd’hui le coronavirus a montré aussi que les urgences sanitaires aussi peuvent nous amener à une situation de dépassement avec ces scènes de vie qui ressemblent à bien des égards à des images de guerre et leur lot de désolation. L’adaptation de nos systèmes de santé face à ce nouveau type de menaces doit se faire à l’aune de celui sécuritaire qui a eu à affronter des menaces du même type. C’est-à-dire de provenance inconnue, diffuse et confuse. Face aux menaces dites asymétriques incarnées essentiellement par le terrorisme, les appareils sécuritaires du monde entier ont été obligés de revoir leur dispositif. Formatées pour faire face aux menaces dites symétriques, c'est-à-dire venant d’un ennemi connu et localisé, souvent un Etat, ces appareils sécuritaires ont vu émerger en face d’elles, de nouvelles menaces diffuses et inconnues. Dans ces réponses, ces appareils ont développé ce qu’ils appellent un continuum entre la sécurité et la défense, c’est-à-dire une coopération étroite entre les acteurs publics civils et militaires qui n’est pas contradictoire avec des cultures professionnelles et des référentiels juridiques spécifiques.  La défense implique la protection d’un territoire face à des menaces externes alors que la sécurité a été mise en avant pour protéger les citoyens à l’interne. Ces deux aspects devraient être pris en compte pour voir comment faire face aux autres urgences sanitaires à venir. Et aussi mettre la riposte sanitaire en amont ou en aval et qui doit être le fil conducteur de ce continuum…..
Cette crise est une occasion ainsi pour notre système de santé d’apprendre sur lui-même, d’apprendre des autres et apprendre aux autres. Chez les Chinois, où a pris départ cette crise sanitaire planétaire, ils désignent le terme « wei ji » pour traduire le mot crise avec ainsi deux versants, le risque et l’opportunité. Opportunité pour comprendre, d’apprendre de sa fragilité, de s’adapter et capacité à faire face à l’urgence.
Donc apprenons et adaptons nous vite.  « Celui qui excelle à résoudre les difficultés le fait avant qu’elles ne surviennent », nous enseigne aussi la sagesse d’un grand maitre chinois, Sun Tzu, connu pour être un chantre de la pensée sécuritaire…
Wuhan n’était pas si lointain de nous alors…..

*Journaliste et diplômé en Relations internationales et études de sécurité