La
région des Grands Lacs a cette manie de marquer l’actualité africaine dans le
mauvais sens ces 20 dernières années. Entre conflits ethniques, rebellions
chroniques, instabilité politique. Cette zone stratégique tant sur
le plan économique que géographique est atteinte aujourd’hui par le virus
constitutionnel. Cette maladie qui est en train de ronger les démocraties
africaines. La démocratie africaine comme un grand corps malade souvent
victime de crises épileptiques , avait donné quelques signes d’un
rétablissement qui n’était juste que temporaire avec un risque de plonger dans
un coma profond. Aujourd’hui après le forcing au Burundi et les velléités de
modification constitutionnelle en République Démocratique du Congo, et au
Rwanda, c’est le Congo Brazzaville qui s’achemine vers un référendum
constitutionnel. Paradoxalement presque, tous les hommes à la tête de ces Etats
y sont parvenus par les armes et refusent de quitter le pouvoir par les urnes
ou la Constitution. Denis Sassou Nguesso, Paul Kagamé et Pierre Nkurunziza, tous anciens seigneurs de
guerre, sont devenus des ciseleurs de Constitution. La région des
Grands Lacs a payé un lourd tribut dans les conflits qui l’ont secouée
ces dernières années et qui font partie des plus meurtriers de l’ère post
Seconde guerre mondiale. Les atrocités commises, tant au Rwanda, dans les deux
Congo qu’au Burundi, avaient fait penser que cette zone ne serait plus cet
épicentre conflictuel de l’Afrique. Vraie poudrière, la région des Grands Lacs, a
donné une telle image du continent qui avait fait penser à beaucoup que
l’Afrique était sans issue durant les années 1990.
Malgré
le chemin parcouru par des pays comme le Rwanda avec des avancées économiques,
le virus constitutionnel est venu remettre en cause toute cette convalescence
et croissance. La tentation du troisième mandat, véritable recul démocratique,
dénoncée partout, s’est propagée comme un virus parmi les élites dirigeantes de
ces pays qui partagent beaucoup de similitudes démographiques, géographiques,
politiques. Devenu parrain et doyen de la région, Denis Sassou Nguesso a
présenté un projet de référendum pour une modification de la Constitution afin
de briguer un troisième mandat. Une situation qui n’a pas manqué de créer une
tension dans ce pays qui a connu une terrible traversée du désert avec ce qu’on
appelait « la guerre des milices ». Aujourd’hui, ces acquis sur la
pacification du Congo Brazza peuvent être remis en cause avec cette nouvelle
instabilité occasionnée par la tentation du troisième mandat. Comme partout en
Afrique ces dernières années, elle a soulevé une vague de contestation avec la
jeunesse comme fer de lance pour restaurer les acquis démocratiques. La
jeunesse africaine comme elle l’a montré dans plusieurs pays, veut ainsi jouer
sa partition dans l’évolution démocratique du continent. C’est la partition des
puissances occidentales notamment la France qui a fait fausse note. La
déclaration de François Hollande selon laquelle « le
président Sassou peut consulter son peuple, ça fait partie de son droit, et le
peuple doit répondre » est venue ajouter une nouvelle cacophonie à la gamme
jouée par la France dans ces régressions démocratiques en Afrique. Une position
du président français qui est aux antipodes de ses déclarations sur les
modifications constitutionnelles affirmées haut et fort lors de ses
discours aux sommets de la Francophonie de Kinshasa 2012 et de
Dakar en 2014.
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